23/04/2011: Gaz de schiste : une ressource non-quantifiée en France
La France ignore actuellement quelles sont ses ressources exactes en gaz de schiste. L'industrie de l'énergie souhaiterait une évaluation.
Les gaz de schiste en France, combien de réserves ? Alors que le débat continue à faire rage sur cette source d'énergie, c'est, d'un point de vue économique, l'une des questions centrales. «Mais il est impossible de répondre pour le moment. Les éléments géologiques à notre connaissance sont trop peu fiables pour se livrer à une estimation précise», répond d'emblée Bruno Courme, le directeur de la filiale Gas Shale de Total en Europe. La compagnie tricolore dispose actuellement d'un permis d'exploration, dans la région de Montélimar.
Il n'empêche, certaines évaluations, mêmes théoriques, ont déjà été faites. Voici quelques mois, un document interne du même Total avait été divulgué. Il mentionnait un chiffre théorique de 2.380 milliards de m3 pour ce seul permis de Montélimar. Soit 10 à 20 fois la consommation nationale annuelle de gaz, selon que le taux de récupération des gisements s'élève à 20 ou 40 %. «Mais il ne s'agit que d'un scénario très prospectif, qui n'est pas étayé par des analyses géologiques. À ce stade, aucun chiffre n'est réaliste», reprend Bruno Courme.
«Explorer le sous-sol à défaut de l'exploiter»
En attendant, le rapport d'étape, communiqué avant-hier au gouvernement, souligne que «la probabilité que l'accès à ces gisements permette à notre pays (…) de réduire très sensiblement ses importations d'hydrocarbures et de limiter d'autant le déficit de sa balance commerciale, n'apparaît pas négligeable.»
Pour un spécialiste du secteur, si les gaz de schistes en France s'approchaient déjà du potentiel de l'ancien gisement gazier de Lacq (Pyrénées-Atlantiques), «on aurait tort de les dédaigner». Lacq, en l'occurrence, a représenté quelque 250 milliards de m3, soit cinq fois la consommation annuelle nationale (aux alentours aujourd'hui de 50 milliards de m3). Pour un autre expert, les réserves d'hydrocarbures non conventionnels en France pourraient représenter jusqu'à 5 % de la consommation énergétique nationale, «ce qui rend au moins nécessaire d'explorer le sous-sol français à défaut de l'exploiter».
En attendant les prochains développements de cet épineux dossier, l'Union française des industries pétrolières (Ufip) se félicite que ce rapport provisoire permette de garder la porte entre-ouverte à une estimation géologique. «La phase d'expérimentation que nous préconisons est clairement recommandée. Nous pensons qu'il ne faut surtout pas abroger les permis en cours, mais bien explorer de manière conventionnelle les gisements concernés pour les évaluer, souligne Jean-Louis Schilansky, le président de l'Ufip. Mais la filière sait aussi que le gouvernement ne l'entend pas de cette oreille.