23/04/2011: Gaz de schiste : «Le gouvernement joue un double jeu», selon Nicole Bricq
Les gaz de schistes seront-ils exploités en France ? Le gouvernement a commandé en février un rapport sur la question. Il est favorable à des travaux de recherche et des tests d’exploration sous un contrôle strict. « Il serait dommageable pour l’économie et l’emploi que notre pays aille jusqu’à s’interdire (…) de disposer d’une évaluation approfondie de la richesse potentielle » de ces gisement, peut-on lire dans le pré-rapport diffusé jeudi.
La sénatrice PS Nicole Bricq, qui combat l’exploitation des gaz de schiste, se dit inquiète par ce rapport. « Les entreprises qui ont les brevets ne désarment pas et font remonter leurs revendications au niveau du gouvernement », pense-t-elle. La sénatrice de Seine et Marne ajoute : « On gèle les choses provisoirement et après 2012, si Sarkozy est réélu, les affaires reprendront ». Entretien.
Ce rapport sur les gaz de schiste vous inquiète-il ?
Oui. Ça ne règle aucun problème. Si j’ai bien compris, on considère que c’est une ressource qui va sauver la France en termes d’indépendance énergétique. La conclusion est de dire qu’il faut faire des recherches. Ça corrobore ce que je pense. Les entreprises qui ont les brevets ne désarment pas et font remonter leurs revendications au niveau du gouvernement. Le rapport préconise d’attendre 2 ans. On y reviendra après 2012 je pense. Ça ne règle aucun problème pour la transparence des permis d’exploration et les méthodes utilisées : il faut toujours aller à 2000 mètres de profondeur pour forer sous les nappes phréatiques.
Nous allons voir l’insistance que vont mettre les parlementaires UMP pour débattre du texte de M. Jacob le 10 mai à l’Assemblée. Nathalie Kosciusko-Morizet s’est engagée à ce que l’ordonnance qui réforme le code minier soit soumise au débat parlementaire. Elle a déposé son texte en conseil des ministres. Dans ce que j’ai lu, on ne différencie pas les permis en fonction de ce qu’on cherche donc le problème reste entier à mes yeux.
François Fillon a annoncé qu’il allait annuler les permis d’exploration déjà accordés. Le gouvernement joue-t-il un double jeu ?
Complètement, il joue un double jeu, dans la mesure où il y a les sénatoriales en septembre et la présidentielle l’année prochaine. Il sait bien que les populations sont fort mécontentes. Et pas uniquement les écologistes. Donc on gèle les choses provisoirement et après 2012, si Sarkozy est réélu, les affaires reprendront.
Donc il faut régler les problèmes de fond avant 2012. Il faut plus de transparence sur tous les permis de forage. Et l’annulation des permis octroyés. Il y a juste un engagement de François Fillon mais pas encore d’actes. Il faut qu’il y ait une enquête publique quelle que soit le permis attribué. Et différencier les permis selon ce qu’on recherche. Les forages conventionnels pour le pétrole, qui existent déjà, ne posent pas de problème. Mais la seule technique pour le gaz de schiste est de faire exploser les roches. Qu’on ne nous raconte pas des histoires.
Craigniez-vous que ce rapport ouvre la voie à l’exploitation du gaz de schiste en France ?
Oui. Tout dépend de ce que le gouvernement va en faire. Bien entendu, Eric Besson, le ministre de l’Industrie, a dit qu’effectivement c’était une ressource intéressante, qu’il fallait faire des recherches. Mais pour ça, il faut forer à 2000 mètres. Je ne connais pas d’autres techniques pour le faire. Et s’il y en avait, ils disent qu’on attendrait deux ou trois ans. Mais la réalité, c’est qu’un permis de rechercher, c’est un permis d’explorer. Dire qu’on va attendre, c’est du vent électoral. Allez dire ça au gens qui élèvent des moutons en Ardèche, dans le Lot ou ailleurs.