Attendre 2012. Face à l’inquiétude des populations, encore exprimée ce week-end lors de multiples manifestations, le député UMP Christian Jacob a proposé une loi visant à interdire les projets d’exploration actuels. Une position très politique. "La Seine-et-Marne est le département de Copé et Jacob. Quand vous savez cela, vous avez tout compris", explique François-Michel Gonnot, corapporteur UMP de la mission parlementaire. La loi, elle sera votée le 10 mai prochain. "On légifère et on expertise après. Il n’y a qu’en France qu’on fait des choses pareilles", s’étrangle Philippe Martin, corapporteur PS.
Mais, en coulisse, la position du gouvernement n’est pas si tranchée. Le rapport interministériel ne sera pas remis ces jours-ci comme prévu. La mission a été prolongée sans savoir quand elle se terminera, indique-t-on dans l’entourage du gouvernement. Sûrement pas avant l’élection présidentielle. D’ici là, les rapporteurs de la mission vont se rapprocher des industriels. "L’objectif est de démontrer qu’on peut exploiter du gaz de schiste en respectant l’environnement", indique une source gouvernementale. Alors que les prix de l’énergie s’envolent, Matignon ne veut pas totalement hypothéquer les chances d’exploiter du gaz de schiste en France.
Lourdes indemnisations
Suspension plutôt qu’annulation? Sans doute aussi un moyen d’éviter de trop lourdes indemnisations. En cas d’abrogation, "l’unité de compte, c’est la centaine de millions d’euros, pour l’ensemble des permis accordés", assure Me Marc Fornacciari, défenseur de la compagnie Schuepbach. "La jurisprudence est très claire. Elle indemnise les coûts et le manque à gagner, car le permis d’exploration mène automatiquement à l’exploitation", fait-il valoir. Là est l’enjeu.
"Je doute qu’ils puissent réclamer un manque à gagner alors qu’on ne sait même pas s’il y a du gaz dans le sol", temporise-t-on au cabinet du ministère de l’Écologie. Pour l’avocate de collectifs anti-gaz de schiste, Hélène Bras, l’avis est plus tranché: "L’indemnisation ne pourra régler que les sommes engagées." De quoi faire fondre les millions en milliers d’euros. Pour Schuepbach et ses permis de Nant et de Villeneuve-de-Berg, la somme retomberait, par exemple, à 645.000 euros, selon des chiffres transmis aux services du ministère de l’Écologie. Pour l’heure, Total se refuse à parler indemnisation pour ne pas mettre la pression sur le gouvernement. "Tout cela va se régler par une transaction à l’amiable. Il y a encore une cinquantaine de dossiers en attente. Cela peut être un des moyens de négociation", laisse entrevoir l’UMP François-Michel Gonnot.
Vous aurez noté la phrase clé "La jurisprudence est très claire. Elle indemnise les coûts et le manque à gagner, car le permis d’exploration mène automatiquement à l’exploitation". Il suffisait de le dire...