02/04/2011: Retour sur Jean-Louis Borloo et les banques
Jean-Louis Borloo, les Gaz de Schiste et son avenir politique
Jean-Louis Borloo semble avoir de grandes ambitions politiques.
C’est peut-être pourquoi il refuse de répondre à toute question concernant les gaz de schiste. Mais de quoi a-t-il peur ?
On ne l’a pas entendu lors du débat sur les gaz de schiste à l’Assemblée Nationale, à peine entrevu sur la chaîne de télévision parlementaire lors de questions au gouvernement laissant, d’un air dégagé et indifférent, Nathalie Kosciusco-Morizet, son successeur, se débrouiller tant bien que mal du sujet.
Interrogé il y a peu sur Antenne 2, la question des gaz et huile de schiste n’a pas non plus été abordée. « Question interdite » selon la chaîne.
Nous avons donc décidé de lui poser directement quelques questions par mail, le 27 mars dernier, à son adresse de l’Assemblée Nationale mais n’avons pour l’heure reçu aucune réponse. Voici le texte de notre mail (pour plus de certitude quant à sa bonne réception, nous l’avons retransféré le 30 mars 2011)
Monsieur le Ministre,
Nous ne vous avons pas entendu exprimer votre avis dans le débat qui occupe de nombreux Français à propos des gaz de schiste.
Aussi nous souhaitons vous demander des réponses à quelques questions :
Les permis « Gaz de schiste » :
Vous avez accepté des permis d’une activité hautement agressive pour l’environnement sur des zones incluant notamment des parcs naturels. Pourquoi ? Que saviez-vous de la technique d’exploration ou d’extraction des gaz de schiste ?
Vous avez accordé (Villeneuve de Berg) ou jugé recevable (Brignoles) des permis d’exploration d’une entreprise, Schuepbach, annonçant un capital social ridiculement faible de 5,2 millions de Dollars (moins de 4 millions d’€uros).
Pensez-vous réellement que cette société a les capacités d’entreprendre des travaux lourds d’exploration ou, à terme, d’exploitation de gaz de schiste, sans équipement industriel à la mesure de la chose ?
Qu’est-ce qu’un fournisseur de gaz naturel dans votre esprit ?
Pour nous, c’est un distributeur. Mais pour vous ?
Une fois qu’il sera extrait (s’il l’est un jour), ce fameux gaz dit « de schiste » mais qui n’est autre qu’un « gaz naturel », il faudra bien le distribuer.
Vous avez accepté, par décret, de nouveaux opérateurs sur le marché de la fourniture de gaz (donc de la distribution ?) dont … des banques. Nous ne savions pas encore que les banques étaient des entreprises industrielles confirmées et spécialistes de la distribution du gaz !
Parmi ces banques élues au nirvana de la fourniture (distribution ?) de gaz en France :
- JP Morgan par votre arrêté du 5 janvier 2010 : banque poursuivie pour 6,4 milliards de dollars pour avoir hébergé les « comptes Madoff ». (Une banque clairvoyante ?)
- Goldman Sachs, par votre arrêté du 19 janvier 2010 : la banque championne des subprimes qu’il a fallu que les Etats-Unis renflouent en hâte en 2008, sans quoi le système financier mondial s’autodétruisait. (Une banque exemplaire ?)
- La Société Générale, par votre arrêté du 22 septembre 2010 : la banque à qui son employé Kerviel a coûté plus de 5 milliards d’euros. (Une banque bien gérée ?)
- Le Crédit Agricole : cette fois-ci, l’arrêté, plus tardif a été signé par Eric. Besson, le 20 janvier 2011. (Si les agriculteurs ne peuvent plus exploiter le sol, qu’au moins la banque profite du sous-sol. Le bon sens près de chez nous ?)
Les banques sont-elles vraiment les meilleurs « fournisseurs » de gaz naturel possibles en France ?
Vous avez également accepté (toujours par décret), la société italienne A2A Trading. Nous ne la connaissions pas mais un petit tour sur son site internet (mot clé sur Google : A2A trading) nous permet de lire :
The environment as an opportunity
The A2A Group has always taken great care over the close link between energy and the environment, and as such, is one of Italy’s principal hydroelectric producers which sees renewable energy as an opportunity to :
- produce clean energy : offering third party producers the possibility of selling electricity in a manner that will take the specific characteristics of the source and added environmental value into consideration ;
- market clean energy : offering structured “CO2 free” products that come from renewable sources ;
- consume clean energy : adhering to certification systems guaranteeing that energy is from a renewable source, which can be used for marketing and communications (Renewable Energy Certificate System, RECS, Marchio “100% energia verde”, etc.).
Croyez-vous réellement, Monsieur Borloo, que le gaz de schiste soit une énergie “clean” et que le gaz naturel ne produise pas de CO2 et qu’il est issu d’une énergie renouvelable ?
Nous nous permettons modestement de vous rappeler 3 formules chimiques apprises en classe de 1ère D, il y a quelques années :
Combustion du propane : 1 C3H8 + 5O2 = 3 CO2 + 4H2O (+ énergie)
Combustion du butane : 2 C4H10 + 13 O2 = 10 H2O + 8 CO2 (+énergie)
Combustion du méthane : 1 CH4 + 2 O2 = 1 CO2 + 2 H20 (+énergie)
Mais peut-être que la combustion des gaz a changé ces dernières années ?
Voici, Monsieur Borloo, les 1ères questions que nous souhaitions vous poser.
Dans l’attente de votre réponse, nous vous prions d’agréer, Monsieur le Ministre, nos salutations distinguées
Brigitte Grivet
Apparemment donc, Monsieur Borloo ne souhaite pas s’exprimer sur les gaz ou huile de schiste et les permis qu’il a signés pour la France. Que craint-il ? Que ces gaz de schiste ne deviennent pour lui ce que les diamants de Bokassa ont été pour Valéry Giscard d’Estaing ou son appartement de fonction pour Hervé Gaymard ? Un coup de frein à sa carrière politique ? La ruine de ses espérances à de hautes fonctions nationales ?
Sans réponse de sa part, rester dans ce qui semblera être un déni de ses responsabilités aux yeux de nombreux électeurs (dont certains qui pourraient lui être favorables tant la question des gaz de schiste est « trans-partisane ») le sera assurément.
Des éclaircissements de ses décisions antérieures et des explications claires, qu’il est sûrement en mesure d’apporter, ne peuvent que lui être favorables. Alors ? Nous attendons … mais notre patience a des limites !
Brigitte Grivet